Session plénière du Forum économique et humanitaire Russie-Afrique

Azali Assoumani, président de l’Union africaine et de l’Union des Comores, le patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie, Benedict Oramah, président du conseil d’administration de la Banque africaine d’import-export et Dilma Rousseff, présidente de la Nouvelle banque de développement ; ont également participé à la réunion. La réunion était animée par Irina Abramova, directrice de l’Institut de l’Afrique de l’Académie des sciences de Russie.

 

Le thème principal du Forum est les technologies et la sécurité au nom du développement souverain au bénéfice de l’Homme.

 

* * *

 

Irina Abramova : Excellences, Mesdames, Messieurs, chers collègues et amis,

 

Nous commençons la session plénière du Deuxième forum économique et humanitaire Russie-Afrique.

Je donne la parole au Président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine.

 

Vladimir Poutine : Merci.

 

Cher monsieur Assoumani, chers chefs d’État et de gouvernement, hauts représentants des pays du continent africain, mesdames, messieurs,

 

Tout d’abord, je voudrais vous souhaiter la bienvenue à Saint-Pétersbourg. Je vous remercie d’avoir répondu à notre invitation. Vous êtes dans notre pays chez des amis et des personnes partageant les mêmes idées.

Les participants à la session plénière du Forum économique et humanitaire sont très représentatifs. Je pense qu’il est symbolique que le programme du Sommet Russie-Afrique commence par cette rencontre importante. Sa devise – « Technologie et sécurité pour un développement souverain au bénéfice des populations » – semble tout à fait d’actualité. Bien entendu, nous discuterons de toute une série de questions relatives aux finances, au commerce, aux investissements, à l’enseignement et aux questions sociales, en liaison avec les changements dynamiques qui se produisent dans le monde dans le domaine du numérique et de l’information. Dans le même temps, l’accent est mis sur le renforcement du bien-être de nos citoyens, l’amélioration de leurs conditions de vie et la résolution des problèmes urgents.

Je constate que de nombreuses discussions utiles et constructives ont lieu dans le cadre des sessions spécialisées du forum sur l’énergie, la logistique et les transports, l’agriculture, la finance et la santé publique. Des idées prometteuses et des propositions de nouveaux projets conjoints mutuellement bénéfiques, d’arrangements pratiques spécifiques et de contrats commerciaux sont à l’étude.

Le potentiel de l’Afrique est évident pour tous. Par exemple, le taux de croissance annuel moyen du PIB du continent au cours des 20 dernières années est de 4 à 4,5 % par an, donc supérieur à la moyenne mondiale. La population approche les 1,5 milliard d’habitants et croît plus rapidement que partout ailleurs dans le monde. Il est également caractéristique que la croissance de la classe moyenne, qui constitue la principale demande en biens et services, dépasse les indices similaires dans la plupart des régions du monde.

La Russie, représentée par les cercles officiels, les entreprises et l’opinion publique, est sincèrement intéressée à approfondir les liens commerciaux, d’investissement et humanitaires multiformes avec le continent, qui répondent aux besoins de tous nos pays et contribuent à une croissance et une prospérité durables. Je note que le volume des échanges entre la Russie et l’Afrique était de 18 milliards de dollars l’année dernière. C’est l’un des résultats évidents du sommet Russie-Afrique de Sotchi. Je suis persuadé qu’ensemble, nous pouvons accroître ces échanges de manière plus radicale dans un avenir proche. D’ailleurs, pour le seul premier semestre de cette année, le volume des opérations d’import-export avec les pays africains a augmenté de plus d’un tiers. La structure du volume des échanges est également bonne : plus de 50 % des fournitures russes à l’Afrique sont des machines et des équipements, des produits chimiques et des denrées alimentaires.

Nous comprenons l’importance d’un approvisionnement ininterrompu en denrées alimentaires pour les pays africains, c’est essentiel pour le développement socio-économique et le maintien de la stabilité politique. C’est la raison pour laquelle nous avons toujours accordé et continuerons d’accorder une attention particulière à la fourniture à nos amis africains de blé, d’orge, de maïs et d’autres cultures céréalières, y compris dans le cadre de l’aide humanitaire du programme alimentaire des Nations unies.

 

Chers amis, les chiffres parlent d’eux-mêmes : l’année dernière, les échanges de produits agricoles entre la Russie et les pays africains ont augmenté de 10 % pour atteindre 6,7 milliards de dollars et, de janvier à juin de cette année, ils ont déjà connu une hausse record de 60 %. La Russie a exporté 11,5 millions de tonnes de céréales vers l’Afrique en 2022, et près de 10 millions de tonnes au cours des seuls six premiers mois de cette année. Et ce, malgré les sanctions illégales imposées à nos exportations et qui entravent sérieusement l’approvisionnement en denrées alimentaires russes, compliquant le transport, la logistique, l’assurance et les paiements bancaires.

Une image paradoxale se dessine : d’une part, les pays occidentaux font obstacle à l’approvisionnement de nos céréales et de nos engrais, tandis que d’autre part – je le dirai sans détour – ils nous accusent hypocritement d’être responsables de la situation de crise actuelle sur le marché mondial des denrées alimentaires. Cette attitude a été particulièrement manifeste lors de la mise en œuvre de ce que l’on appelle l’accord sur les céréales conclu avec la participation du Secrétariat des Nations unies et visant initialement à garantir la sécurité alimentaire mondiale, à réduire la menace de la faim et à aider les pays les plus pauvres, notamment en Afrique.

Cependant, en près d’un an, dans le cadre de ce prétendu accord, un total de 32,8 millions de tonnes de marchandises a été exporté d’Ukraine, dont plus de 70 %, chers amis, sont allés vers des pays aux niveaux de revenus élevés et supérieurs à la moyenne, y compris, et surtout, l’Union européenne, tandis que des pays comme l’Éthiopie, le Soudan, la Somalie et un certain nombre d’autres ont représenté – veuillez le noter – moins de trois pour cent du volume total : moins d’un million de tonnes.

La Russie a participé à ce prétendu accord en raison des engagements qu’il contenait et qui consistaient à éliminer les obstacles illégitimes à la fourniture de nos céréales et de nos engrais sur les marchés mondiaux. Je tiens à vous dire qu’il s’agissait avant tout d’aider les pays les plus pauvres.

Rien de ce que nous avons négocié et de ce qui nous a été promis ne s’est produit. Aucune des conditions de l’accord, qui consistait à soustraire aux sanctions les exportations russes de céréales et d’engrais vers les marchés mondiaux, n’a été remplie. Pas une seule. Des obstacles ont également été mis à notre transfert d’engrais vers les pays les plus pauvres qui en ont besoin – que mes collègues et moi-même venons de rencontrer avec les dirigeants de l’Union africaine – et ce, gratuitement. Sur les 262 000 tonnes d’engrais bloquées dans les ports européens, nous n’avons pu envoyer que deux lots : seulement 20 000 tonnes au Malawi et 34 000 tonnes au Kenya. Le reste est resté entre les mains des Européens. Et ce, malgré le fait qu’il s’agissait d’une action purement humanitaire à laquelle aucune sanction ne devrait en principe s’appliquer.

D’accord, si on ne veut pas que la Russie, comme certains le disent, « s’enrichisse » en allouant de l’argent à des fins militaires. Mais il s’agit d’une livraison gratuite ! Non, on ne la laisse pas passer. Malgré tous les discours creux sur la volonté d’aider les pays les plus pauvres.

Compte tenu de ces faits, nous avons renoncé à prolonger cet « accord ». J’ai déjà dit que notre pays était en mesure de remplacer les céréales ukrainiennes tant contre paiement que sous la forme d’une aide gratuite aux pays les plus démunis d’Afrique, d’autant plus que nous nous attendons cette année encore à une récolte record.

Pour être précis, j’ajouterai, je dirai : nous serons prêts à fournir gratuitement au Burkina Faso, au Zimbabwe, au Mali, à la Somalie, à la République centrafricaine, à l’Érythrée, à hauteur de 25 000 à 50 000 tonnes de céréales dans les prochains mois, dans les trois à quatre mois à venir, et nous assurerons la livraison gratuite de ces produits aux consommateurs.

Quelques chiffres supplémentaires seront probablement intéressants : l’Ukraine a produit environ 55 millions de tonnes de céréales au cours de la dernière campagne agricole. Ses exportations se sont élevées à 47 millions de tonnes, ce qui est considérable, dont 17 millions de tonnes de blé. Quant à la Russie, chers collègues, elle a récolté 156 millions de tonnes de céréales l’année dernière. Elle en a exporté 60 millions de tonnes, dont 48 millions de tonnes de blé.

La part de la Russie sur le marché mondial du blé est de 20 %, celle de l’Ukraine de moins de 5 %. Cela signifie que c’est la Russie qui contribue de manière significative à la sécurité alimentaire mondiale et qu’elle est un fournisseur international solide et responsable de produits agricoles. Et ceux qui prétendent que ce n’est pas vrai, que seul ce prétendu accord sur les céréales permet d’exporter les céréales ukrainiennes, ne font que déformer les faits, raconter des contrevérités. En fait, c’est la pratique de certains pays occidentaux depuis des décennies, voire des siècles.

Notre pays continuera à soutenir les pays et les régions dans le besoin, y compris au moyen d’aides humanitaires. Nous nous efforçons de participer activement à la mise en place d’un système plus équitable de répartition des ressources et nous faisons tout notre possible pour éviter une crise alimentaire mondiale.

En principe, nous sommes convaincus qu’avec l’application de technologies agricoles appropriées et l’organisation correcte de la production agricole, l’Afrique peut, à long terme, non seulement se nourrir et assurer sa propre sécurité alimentaire, mais aussi devenir un exportateur de divers types de denrées alimentaires. Et la Russie ne pourra que vous soutenir, je vous l’assure.

Mes collègues et moi en parlions justement hier lors de nos rencontres bilatérales, et mes homologues africains m’en ont parlé, ils me l’ont dit : nous avons la capacité de produire de la nourriture, nous avons besoin de technologies et d’un soutien approprié. Pour sa part, la Russie est prête à partager son expertise en matière de production agricole avec les pays africains et à les aider à utiliser les technologies les plus avancées.

Nous sommes également intéressés au renforcement de la coopération avec les pays africains dans le secteur de l’énergie. Cette coopération repose sur une riche expérience : au fil des ans, les spécialistes soviétiques et russes ont conçu et construit de grandes centrales électriques en Angola, en Égypte, en Éthiopie et dans d’autres pays du continent, d’une capacité totale de 4,6 gigawatts, créant au total – je tiens à le souligner et à attirer votre attention sur ce point, chers amis – un quart de toutes les capacités hydroélectriques de l’Afrique.

À l’heure actuelle, les entreprises russes mettent en œuvre de nouveaux projets mutuellement bénéfiques visant à répondre aux besoins croissants des économies africaines en combustible et en capacité de production, et à fournir aux Africains un accès à des sources d’énergie peu coûteuses et fiables, durables et respectueuses de l’environnement.

Plus de 30 projets énergétiques prometteurs avec une participation russe dans 16 pays africains sont actuellement à différents stades de développement. La capacité totale des projets énergétiques sur lesquels nous travaillons est d’environ 3,7 gigawatts. Notre société RusHydro offre une large gamme de services aux partenaires africains, allant de la conception et de la fourniture d’équipements à la modernisation clé en main et à la construction de nouvelles centrales de génération. Gazprom, Rosneft, Lukoil et Zarubezhneft sont des entreprises russes impliquées dans le développement de champs pétroliers et gaziers en Algérie, en Égypte, au Cameroun, au Nigeria et au Congo-Brazzaville. Ces deux dernières années, les exportations de pétrole brut, de produits pétroliers et de gaz naturel liquéfié russes vers l’Afrique ont été multipliées par 2,6.

Rosatom, notre entreprise publique leader dans l’utilisation de l’énergie nucléaire, construit la centrale nucléaire de Dabaa en Égypte. Dans le même temps, elle peut faire bénéficier les pays africains de son expérience unique et de ses technologies inégalées dans l’utilisation non énergétique du « nucléaire civil », par exemple dans la médecine et l’agriculture.

L’approfondissement de la coopération industrielle russo-africaine revêt une importance particulière. Nos produits industriels tels que les automobiles, les équipements de construction, etc., sont largement connus sur le continent et font l’objet d’une forte demande ; ils se distinguent par leur bonne qualité, leur fiabilité et leur facilité d’utilisation. Il existe en Afrique des centres de maintenance spécialisés dans l’entretien des équiepements russes.

De nouveaux instruments sont en cours de développement pour l’octroi de prêts préférentiels pour l’achat par les Africains de nos produits industriels, leur transport vers le continent et le service après-vente. L’agence russe d’assurance des crédits à l’exportation et des investissements fournit une couverture d’assurance pour les prêts. Un mécanisme de crédit-bail orienté vers l’Afrique et un fonds d’investissement spécialisé sont en cours de création pour participer au financement de projets d’infrastructure. En Égypte – j’en ai parlé à mon collègue le président al-Sissi hier – nous discutons et espérons lancer une zone industrielle russe près du canal de Suez dans un avenir proche. Nous espérons que la construction des premiers sites de production commencera dès cette année et qu’à l’avenir, les marchandises produites seront exportées dans toute l’Afrique.

En tant qu’un des leaders des technologies de l’information et des communications, la Russie développe sa coopération avec les pays africains dans les domaines de la sécurité de l’information, de l’intelligence artificielle et de l’économie numérique. Nous avons une bonne expérience de la création et de l’utilisation des technologies de l’information dans l’administration fiscale, l’enregistrement des droits de propriété, la fourniture de services gouvernementaux électroniques aux citoyens, aux personnes morales et aux entreprises. Nous pouvons aider les pays africains intéressés à lancer des systèmes similaires et sommes toujours prêts à partager notre expérience dans le contexte du développement technologique.

Afin d’élargir encore l’éventail des relations commerciales et économiques, il est important de passer plus résolument à l’emploi des monnaies nationales, y compris le rouble, dans les règlements financiers des transactions commerciales. À cet égard, nous sommes prêts à collaborer avec les pays africains pour développer leur infrastructure financière et connecter les institutions bancaires au système de messagerie financière créé en Russie qui permet d’effectuer des paiements transfrontaliers indépendamment de certains systèmes occidentaux existants et restrictifs. Cela contribuera à améliorer la durabilité, la prévisibilité et la sécurité des échanges commerciaux mutuels.

La Russie est également fortement engagée dans la réorientation des flux de transport et de logistique vers les pays du Sud, et en particulier, bien sûr, l’Afrique. Le corridor de transport international Nord-Sud que nous développons vise à fournir aux marchandises russes un accès au golfe Persique et à l’océan Indien, d’où elles pourront atteindre le continent africain par la route maritime la plus courte. Naturellement, ce corridor peut aussi être utilisé dans le sens inverse pour approvisionner le marché russe en marchandises africaines.

Assurer la connexion du corridor de transport Nord-Sud avec l’Afrique, lancer des lignes régulières de fret maritime – c’est ce que nous recherchons – ouvrir un centre russe de transport et de logistique dans l’un des ports de la côte est africaine serait une bonne chose, un bon début pour ce travail en commun. Nous considérons qu’il est très important d’assurer une plus grande couverture du continent africain par des vols directs, et de participer au développement du réseau ferroviaire africain, ce sont des questions d’actualité sur lesquelles nous proposons à nos amis africains de travailler ensemble.

La Russie souhaite renforcer ses liens multiformes avec toutes les organisations et structures d’intégration économique régionale opérant sur le continent. Par exemple, nous sommes favorables à l’établissement d’une coopération entre l’Union économique eurasienne, le plus grand projet d’intégration auquel la Russie participe, et la zone de libre-échange continentale africaine en cours de formation dans le cadre de l’Union africaine. Nous sommes également prêts à faire part de notre expérience en matière d’intégration avec nos partenaires africains par l’intermédiaire de l’État unifié de la Russie et de la Biélorussie.

Aujourd’hui, nous organiserons un déjeuner de travail avec la participation des chefs d’État et de gouvernement des pays qui dirigent actuellement les principales organisations régionales d’Afrique et les chefs de leurs organes exécutifs. Nous avons l’intention de présenter à nos partenaires africains nos réalisations sur des questions d’intégration aussi importantes que la suppression des restrictions au sein du marché unique, le fonctionnement des zones de libre-échange et la mise en œuvre de politiques agricoles, industrielles et sectorielles coordonnées. Je suis convaincu qu’une telle coopération globale sur des bases bilatérales et multilatérales permettra d’accroître qualitativement et quantitativement les liens économiques avec l’Afrique. J’aimerais également attirer l’attention sur le fait que les commissions intergouvernementales bilatérales ont prouvé leur efficacité dans le développement de la coopération dans les domaines économique et humanitaire. Cependant, aujourd’hui, la Russie n’en a qu’avec un pays sur trois sur le continent, seulement 18 pays sur un total de 54. Par conséquent, nous proposons que les États africains intéressés et non encore impliqués envisagent de former de telles commissions avec nous. Nous sommes bien sûr prêts à le faire et nous pensons que ce serait utile.

Nous sommes également prêts à étendre le réseau des missions commerciales russes opérant en Afrique, à augmenter le nombre de conseillers économiques, d’attachés dans les domaines de l’agriculture, de l’enseignement, de la science et des technologies de l’information et de la communication.

 

Chers amis,

Nous continuerons à accorder la plus grande attention au renforcement des échanges culturels, scientifiques, pédagogiques, sportifs et de jeunesse entre la Russie et les pays africains. Notre pays a également beaucoup à offrir dans ce domaine.

Bien entendu, le domaine traditionnel de la coopération russo-africaine a été et reste la formation de personnel qualifié, nous venons d’en parler lors d’une réunion avec les dirigeants de l’Union africaine.

Aujourd’hui, près de 35 000 étudiants africains font leurs études dans les universités russes, et ce nombre augmente chaque année. Le quota d’étudiants africains financé par le budget fédéral a été multiplié par deux et demi en trois ans et, pour la prochaine année universitaire, il s’élèvera à plus de 4 700.

Il est prévu d’ouvrir des antennes des principales universités russes en Afrique. Une coopération étroite avec les établissements d’enseignement africains est également mise en place dans le cadre du réseau universitaire russo-africain. Je dois mentionner que le 26 juillet, à la veille de notre forum, un accord a été signé à l’université minière de Saint-Pétersbourg sur la création du consortium russo-africain d’universités techniques « Sous-sols d’Afrique [Nedra Africa] » qui prévoit la formation conjointe de spécialistes pour le complexe des ressources minérales. Je pense qu’il s’agit d’un domaine de coopération très important et intéressant.

Nous continuerons à aider nos amis africains à développer non seulement l’enseignement supérieur, mais aussi l’enseignement professionnel général et secondaire, à former des enseignants, des tuteurs et du personnel technique pour les écoles et les collèges, et à créer des écoles communes pour lesquelles du matériel pédagogique adapté est déjà en cours d’élaboration sur la base d’une synthèse des programmes d’enseignement nationaux russes et africains.

Nous proposons d’examiner la possibilité de créer des écoles en Afrique qui enseignent des matières en russe. Je suis convaincu que la mise en œuvre de ces projets – l’étude de la langue russe et l’introduction des normes d’enseignement élevées de notre pays – jettera les bases les meilleures d’une coopération égale et mutuellement bénéfique.

L’année prochaine, une organisation internationale de la langue russe devrait commencer ses activités, elle seraouverte à tous les pays où les gens aiment et veulent utiliser la langue russe et où les gens aiment et s’intéressent à la culture russe. Nous invitons nos partenaires africains à se joindre à ce travail.

Un projet a été lancé dans 28 pays africains pour créer des centres de formation publique afin de former les enseignants et les éducateurs des écoles maternelles, primaires et secondaires. À cette fin, nous prévoyons d’augmenter de manière significative les inscriptions d’étudiants africains dans les universités pédagogiques russes.

Parmi les Africains qui font actuellement leurs études en Russie, plus de 10 000 suivent une formation dans le domaine médical. La santé publique et la lutte contre les épidémies constituent un domaine important de la coopération russo-africaine. Je voudrais vous rappeler que la Russie a été l’un des premiers pays à venir en aide aux pays africains lors de la pandémie de coronavirus : nous avons envoyé gratuitement des millions de tests russes aux pays africains et, en collaboration avec l’Afrique du Sud, nous avons mené des recherches scientifiques sur les nouvelles souches du dangereux virus. Rien qu’au cours des derniers mois, nous avons remis deux laboratoires mobiles russes à nos partenaires de la République démocratique du Congo et continué à équiper le centre russo-guinéen d’étude des infections dans la ville de Kindia, où plus de 20 médicaments diagnostiques ont été mis au point. Environ 1 500 spécialistes locaux ont été formés aux méthodes russes de prévention et de contrôle des infections. Un centre conjoint pour l’étude des infections a également été créé au Burundi.

Un vaste programme russe d’aide à l’Afrique pour lutter contre les infections a été conçu et 1,2 milliard de roubles ont été alloués jusqu’en 2026. Dans ce cadre, 10 laboratoires mobiles seront livrés aux pays du continent, des centaines de spécialistes seront formés et des recherches seront menées conjointement.

Chaque année, les échanges de jeunes entre la Russie et l’Afrique se multiplient. Des représentants de pays africains participent chaque année au programme de voyages d’études de courte durée dans notre pays pour de jeunes représentants des milieux politiques, publics, scientifiques et économiques dans le cadre du programme « Nouvelle génération ». Nous entretenons également des liens avec les Africains qui ont fait leurs études en Russie. Aujourd’hui encore, lors de la réunion précédente, j’ai été très heureux de parler à mes collègues qui parlent couramment le russe.

J’aimerais profiter de cette occasion pour inviter de jeunes amis africains à venir dans notre pays, Sotchi, en mars 2024, pour le Festival mondial de la jeunesse. Il s’agit d’un forum à grande échelle qui réunira des jeunes du monde entier. Plus de 20 000 représentants de plus de 180 pays sont attendus.

Nous attachons une grande importance à la coopération dans le domaine de la culture physique et du sport et nous sommes prêts à développer davantage les liens avec les fédérations sportives des pays africains. Nous proposons d’intensifier la coopération entre les universités sportives de Russie et des pays africains, de réaliser des échanges universitaires, des programmes de volontariat, d’organiser des matchs communs dans différents sports entre les établissements d’enseignement et les universités. Nous invitons les athlètes africains à participer au Festival international du sport universitaire en août dans la ville russe d’Ekaterinbourg, dans l’Oural, ainsi qu’aux Jeux de l’Avenir qui se tiendront en février-mars 2024 à Kazan et qui représentent une combinaison unique de disciplines sportives dynamiques avec les jeux vidéo et les appareils technologiques les plus à la mode. La nouvelle forme de compétition est conçue pour combiner les sports classiques et innovants.

La partie russe est également déterminée à renforcer la coopération avec les pays africains et le continent africain dans son ensemble dans le domaine des communications de masse, à savoir l’échange de contenu, l’organisation de formations pour les employés des médias et les étudiants, et la tenue de rencontres expérimentales. Des travaux sont déjà en cours pour ouvrir des bureaux de représentation des principaux médias russes en Afrique : l’agence de presse TASS, Russia Today, la chaîne de télévision RT, VGTRK et le quotidien Rossiïskaïa Gazeta. Nous proposons de travailler à la création d’un espace d’information commun entre la Russie et l’Afrique dans le cadre duquel des informations objectives et impartiales sur les événements mondiaux seront diffusées aux audiences russes et africaines.

 

En conclusion, je voudrais réaffirmer que la Russie est sincèrement intéressée au développement et à l’approfondissement de la coopération commerciale, économique et humanitaire avec tous les pays africains. Je suis convaincu que les travaux de ce forum et les réunions thématiques, les tables rondes et les négociations organisées dans son cadre seront sans aucun doute utiles et contribueront à la réalisation de tous nos objectifs communs.

 

Merci encore pour votre patience et votre considération. Je vous remercie.

 

 

Irina Abramova : Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 

Votre discours a clairement défini les perspectives, l’essence et les principales orientations de la coopération russo-africaine dans le contexte de la transformation de l’ordre mondial.

Je pense que les participants à notre forum ont reçu des réponses aux questions les plus pressantes qui concernent aujourd’hui la Russie comme l’Afrique. La coopération entre des États égaux et souverains est toujours une voie à double sens, et il est toujours extrêmement important pour nous, les Russes, de connaître l’opinion de nos partenaires africains sur la situation dans le monde et les perspectives de notre coopération.

 

J’ai l’honneur de donner la parole à Son Excellence Monsieur Assoumani, président de l’Union africaine et président de l’Union des Comores.

 

Azali Assoumani : 

Excellence, Monsieur Vladimir Poutine, Président de la Fédération de Russie,

Excellences, Messieurs les Chefs d’État et de Gouvernement des États membres de l’Union Africaine,

Excellence Monsieur Moussa Faki, Président de la Commission de l’Union Africaine,

Excellences, Mesdames et Messieurs les Représentants des Autorités de la Fédération de Russie et de la ville de Saint-Pétersbourg,

Distingués Invités,

 

Je suis extrêmement honoré de représenter aujourd’hui l’Union Africaine lors de ce Deuxième Sommet Russie-Afrique à Saint-Pétersbourg.

Je suis également ravi de mettre en lumière les sujets majeurs pour l’Afrique et de promouvoir notre partenariat avec la Russie, une puissance mondiale active dans notre région.

Tout d’abord, permettez-moi de remercier chaleureusement les autorités russes au nom de l’Union Africaine et en mon nom personnel, pour l’excellente organisation de ce Sommet et l’accueil exceptionnel que nous recevons dans cette magnifique ville de Saint- Pétersbourg, surnommée la « Venise du Nord », symbole de la rencontre entre le génie russe et la volonté politique de Pierre le Grand. Choisir Saint-Pétersbourg pour ce Sommet est aussi un hommage à l’histoire commune entre l’Afrique et la Russie, dont les liens sont indéniables.

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Au XXIe siècle, dans un monde multipolaire, l’Afrique cherche à établir des partenariats équilibrés et sincères avec le reste du monde. Sur le plan économique, l’Afrique, qui abritera 3,8 milliards d’habitants à la fin du siècle, souhaite des partenariats mutuellement bénéfiques avec des pays ainsi qu’avec les grands bailleurs bi et multilatéraux. Avec l’abondance et la diversité de ses ressources humaines et naturelles incontestables, ainsi que la dynamique de sa main-d’œuvre qualifiée et compétente, l’Afrique est tout à fait capable de le faire.

Dans cette optique, la Russie a une place importante en tant que partenaire majeur, et nous sommes prêts à traiter ensemble toutes les questions de coopération.

Ce Sommet Russie-Afrique intervient à un moment charnière pour l’Afrique. Le projet du développement de la Zone de Libre-échange Continentale Africaine (ZLECAF) jusqu’à 2063 a été elaborée lors du Sommet de Niamey en juillet 2019 pour accélérer l’intégration économique du continent.  Nous développons égallement l’agenda africain 2063.

  La ZLECAF offre un vaste marché continental en devenir, ouvrant de réelles opportunités de croissance aux entreprises locales et étrangères investissant en Afrique. Pour réaliser ses objectifs, nos partenariats doivent être adaptés aux priorités du continent, indiquées dans l’agenda 2063, notamment les infrastructures, l’interconnexion, l’industrialisation et les énergies. Elles constituent les principaux points et axes de collaboration active pottentielle avec la Russie.

Il est urgent aujourd’hui de changer nos approches mutuelles afin de construire un partenariat stratégique favorisant la diversification de nos économies, d’autant plus qu’actuellement une grande partie de nos exportations sont des matières premières à transformer. Mais nous traversons une période d’industrialisation et nous nous efforçons de créer des emplois qualifiés durables. C’est très important pour nos jeunes. C’est pour cela qu’il est si important de renforcer les partenariats public-privé dans le contexte russo-africain, ce qui permettra aux acteurs les plus divers de s’impliquer dans le processus.

Bien entendu, l’Union africaine reste à cet égard l’instrument le plus important pour le développement de la diversification économique, en particulier dans les secteurs les plus prometteurs, tels que l’agriculture, la santé, l’enseignement, l’énergie et d’autres encore. Dans le même temps, les entreprises africaines ont besoin d’aide pour renforcer leur productivité et accéder à de nouveaux marchés.

Le secteur agricole primaire représente 80 % de notre PIB. C’est un secteur où les partenariats et nos nouveaux projets peuvent se développer. Le secteur privé et le secteur public de nos pays participeront sur un pied d’égalité à un partenariat mutuellement bénéfique.

 

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Nous travaillons également aujourd’hui à investir dans les nouvelles technologies numériques qui créeront une nouvelle base pour notre coopération. Aujourd’hui, la révolution numérique a lieu sur notre continent, ce qui nous permettra de participer à la nouvelle étape de la révolution industrielle et de résoudre nos problèmes économiques et sociaux de la meilleure façon possible.

Il est très important pour nous de rejoindre rapidement la nouvelle révolution industrielle, la révolution numérique, et à cet égard, il est très important de prêter attention à l’enseignement, à la formation des spécialistes, en particulier de nos jeunes, qui doivent être inclus dans un travail efficace à la fois dans le secteur privé et public et au sein des organisations financières.

 

Notre ambition commune est de renforcer notre partenariat pour le bien-être de nos peuples. Je tiens à exprimer notre profonde préoccupation concernant l’approvisionnement en céréales, vital pour l’Afrique.

La suspension de l’accord sur les céréales pourrait avoir un impact sur notre coopération. La Russie coopère étroitement avec nous et fait beaucoup [pour résoudre] les problèmes céréaliers et alimentaires. Plus de 1,9 million de tonnes ont été fournies par la Russie et le montant des livraisons a dépassé les trois milliards de dollars.

Aujourd’hui, je voudrais profiter de cette tribune, de cette opportunité, pour réitérer l’importance de ce sujet pour nous. Nous en avions parlé en 2019.

La crise ukrainienne a un impact sérieux, donc la résolution de cette crise sauvera beaucoup de vies de personnes qui dépendent de l’approvisionnement alimentaire. Notre continent connaît actuellement une grave [hausse] des prix des denrées alimentaires, nous adressons donc une requête importante à tous les participants au processus : faciliter la livraison de céréales ukrainiennes et russes à nos pays.

Nous sommes prêts à coopérer avec la Russie dans tous les secteurs et domaines afin de garantir des mesures de sécurité sur le continent. Nous faisons tout ce qui est possible pour garantir la paix et la sécurité sur notre continent. Mais, bien sûr, toutes sortes d’événements se produisent aujourd’hui. Vous savez ce qui s’est passé au Niger ces jours-ci. Nous condamnons fermement les événements au Niger et exigeons la libération immédiate du président de la République du Niger et de sa famille.

Aujourd’hui, il faut se battre pour une paix durable entre la Russie et l’Ukraine, et c’est le message que l’Union africaine et moi-même défendons aujourd’hui. C’est avec ce message que nous sommes allés voir le président Zelensky à Kiev. Nous lançons un appel au président russe, Monsieur Poutine. Nous sommes convaincus que notre appel à la paix sera entendu, car c’est ce dont l’humanité a besoin aujourd’hui. Au nom de l’Union africaine, j’appelle une fois de plus à la coexistence pacifique entre la Russie et l’Ukraine, entre peuples frères, entre peuples voisins. Et je vous remercie d’entendre notre message, notre appel.

Nous luttons aujourd’hui pour un monde multilatéral et multipolaire. Nous, Africains, sommes particulièrement conscients que le système international actuel doit être réformé, en particulier celui des Nations unies. Par conséquent, l’Afrique a bien sûr le droit de prendre une part active à la prise de décision, en particulier parmi les membres permanents du Conseil de sécurité, et je m’y emploierai, ainsi que mon collègue qui me remplacera.

J’aimerais que cette salle applaudisse et j’espère que la grande cause de la promotion de l’Afrique sur la scène internationale sera soutenue par la Fédération de Russie.

La participation active de l’Afrique est également nécessaire au sein des pays du G20. Sans ce format, les efforts internationaux ne sont pas possibles aujourd’hui. Une présence accrue de l’Afrique au sein du G20 semble aujourd’hui très importante.

 

 

Excellences, Mesdames et Messieurs,

 

Le Sommet d’aujourd’hui est l’occasion pour nous de mieux comprendre, de prendre conscience de ce que nous devons faire ensemble pour développer les investissements, pour mettre en valeur et développer au mieux notre potentiel.

J’aimerais que le forum d’aujourd’hui formule des recommandations concrètes, en particulier pour le développement de partenariats public-privé (PPP) entre la Russie et l’Afrique. Notre continent croit en l’avenir de la coopération russo-africaine basée sur le respect mutuel et le bénéfice mutuel.

Le Sommet d’aujourd’hui nous permettra certainement d’avancer sur cette voie : vers la paix et la prospérité pour la Russie et l’Afrique, dans l’intérêt de nos peuples.

 

Je vous remercie. Beit Salam

 

 

Irina Abramova : Merci beaucoup, Monsieur le Président.

 

Votre déclaration a montré que les points de vue de la Russie et de l’Afrique sur la situation dans le monde et sur les nouvelles opportunités qui s’ouvrent dans nos relations sont très proches et sur certains points coïncident.

 

Je voudrais dire que le deuxième Forum Russie-Afrique se distingue du premier en ce qu’il n’est pas seulement économique, mais aussi humanitaire. Cela signifie que la Russie et l’Afrique se préoccupent non seulement des valeurs matérielles, mais aussi des valeurs spirituelles.

 

Je cède la parole à Sa Sainteté le Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie.

 

Patriarche Cyrille : 

Excellence, Monsieur le Président de la Fédération de Russie Vladimir Poutine,

Excellence, Monsieur Azali Assoumani, Président de l’Union des Comores,

Messieurs les chefs d’État et hauts représentants des pays d’Afrique,

 

Je suis heureux de vous saluer et vous remercie de cette invitation à intervenir pendant cette rencontre de haut niveau, consacrée au développement de la coopération entre la Russie et les États du continent africain. Le présent Forum est effectivement un événement marquant dans la vie internationale, ayant une dimension politique, économique, spirituelle et culturelle importante.

Malgré l’éloignement géographique, nos pays sont liés par des relations anciennes et amicales. Le secret de cette amitié est assez simple : la Russie n’a jamais regardé le continent africain comme un espace dont elle pourrait profiter ou qu’elle pourrait coloniser. Elle ne s’est jamais adressée aux peuples africains avec condescendance, n’a pas employé avec eux le langage de la supériorité ou celui de la force. Durant les périodes historiques difficiles, nous nous sommes toujours efforcés de faire preuve de solidarité et d’assistance mutuelle. Au moment difficile et crucial de la lutte pour l’indépendance et l’autodétermination des pays d’Afrique, la Russie s’est efforcée de soutenir activement les peuples, œuvrant ensuite avec eux à l’établissement d’une vie paisible, au développement de projets et d’infrastructures. De façon remarquable, cette coopération se poursuit aujourd’hui.

Les bons sentiments qui nous unissent ont résisté à l’épreuve du temps. Ils sont, notamment, solidement basés sur la compréhension des fondements de la vie humaine et sur un attachement profond aux valeurs morales intangibles. La fidélité à la tradition, la conception de la famille comme union d’un homme et d’une femme, l’amour et le respect de l’histoire de son pays, l’aspiration au bien et à la justice, tous ces principes de civilisation essentiels ont une importance déterminante aussi bien pour les Russes que pour les habitants de l’Afrique, qui chérissent tout autant leur identité spirituelle et culturelle. Pour nous, ces principes sont si importants que nous sommes prêts à les protéger et à les défendre.

Et il arrive parfois de devoir les défendre dans des conditions très difficiles. Ces dernières décennies, le monde a changé au point d’être méconnaissable. Je ne parle pas tant de la carte politique, des processus économiques et du progrès technique, que du climat spirituel et moral dangereux que de nombreux pays occidentaux s’efforcent activement de mettre en place. Le relativisme moral ; le culte de la consommation ; la liberté, confondue par erreur avec la permissivité ; la destruction de la famille traditionnelle en tant qu’institution, tout cela n’est qu’une brève liste des malheurs qu’apporte avec lui le système de valeurs imposé par l’Occident, ou, plus exactement, le système d’anti-valeurs, car leur adoption mène inévitablement l’humanité à sa perte et à une profonde dégradation culturelle et spirituelle.

Grâce à Dieu, ce danger est aussi compris ailleurs qu’en Russie, où des lois sont prises au plus haut niveau afin de préserver la société de la propagande d’une culture qui nous est étrangère et de phénomènes moralement malsains, il est aussi compris dans les pays d’Afrique. 

Je sais que malgré une pression colossale, la majorité des pays africains rejettent catégoriquement la légalisation de ce qu’on appelle les mariages homosexuels, de l’euthanasie et d’autres pratiques peccamineuses. Tout ceci nous rapproche indéniablement. Nous partons des mêmes principes de base, et, par conséquent, nous sommes toujours heureux de rencontrer des gens qui ont la même opinion que nous.

Il est remarquable que le rôle de l’Afrique se renforce dans les relations internationales. Les initiatives de paix des pays africains en sont un exemple éclatant, de même que leur participation active à la résolution des problèmes continentaux et globaux. Je suis certain que la Russie et l’Afrique peuvent proposer au monde un modèle constructif de relations loyales et justes entre nations.

Malheureusement, sur la scène internationale, tout le monde n’est pas prêt à mener un dialogue d’égal à égal. Un certain nombre de pays occidentaux sont toujours marqués par leur passé colonial, et ils continuent à penser et à agir suivant ce modèle.

J’espère que le développement des bonnes relations entre la Russie et les pays d’Afrique servira le maintien ultérieur des valeurs traditionnelles dans le monde.

Un autre instrument criminel de la politique contemporaine est l’incitation à la haine interreligieuse. J’ai le regret de constater que ce phénomène est particulièrement répandu sur le continent africain. Malheureusement, les chrétiens sont le plus fréquemment soumis aux persécutions. En tant que primat de l’Église orthodoxe russe, le cœur lourd, je profite de l’occasion pour appeler ardemment tous ceux qui disposent de la possibilité et du pouvoir réel d’influer sur cette tragique situation, de faire leur possible pour défendre les chrétiens opprimés d’Afrique.

La triste expérience des dernières décennies et l’histoire de nombreux conflits régionaux montrent que les provocations sur le terrain religieux sont souvent initiées et financées par ceux qui souhaitent l’affaiblissement du pays de l’intérieur et agissent suivant le fameux principe « diviser pour régner ». Il est extrêmement important de ne pas permettre l’éclatement de conflits religieux. A plus forte raison dans le contexte multiconfessionnel et multiethnique de la plupart des pays d’Afrique.

La diversité culturelle et nationale constitue la richesse de tout pays, et elle doit être soigneusement préservée. La Russie est prête à partager sa précieuse expérience multiséculaire dans ce domaine. Plus de cents nationalités vivent dans notre pays, les représentants de différentes religions et confessions y coexistent harmonieusement : chrétiens orthodoxes, catholiques et protestants, musulmans, juifs, bouddhistes. Nous ne vivons pas seulement côte à côte depuis des siècles, nous professons librement notre foi et coopérons dans les domaines pédagogique et social, s’agissant d’aide humanitaire, de soutien à la paix, etc.

Quant à l’Église orthodoxe russe, consciente de sa responsabilité particulière dans la destinée des peuples qui la composent historiquement, elle aspire à faire son possible pour éduquer les hommes dans la fidélité à la vérité divine, le respect des traditions et l’amour du pays.

L’Église orthodoxe russe a récemment fondé l’Exarchat patriarcal d’Afrique et travaille sur le continent africain à la pastorale des expatriés russes, ainsi qu’à celle des chrétiens orthodoxes locaux. La nécessité de développer notre présence en Afrique est apparue après le schisme survenu dans le monde orthodoxe.

En même temps, la présence de l’Église orthodoxe russe sur le territoire de l’Afrique n’est pas une innovation sans précédent. Des paroisses russes ont commencé à être fondées sur le continent dès la fin du XIXe siècle et le début du XXe.

Ainsi, des églises ont été bâties en Abyssinie en 1889 et en 1896. L’Église orthodoxe russe dispose en permanence d’une paroisse en Égypte depuis 1914. Après la révolution, et avec l’afflux de réfugiés russes, de nombreuses paroisses ont ouvert sur le continent africain : une église a été consacrée à Tunis en 1920, en 1922 une paroisse a été fondée à Alger ; en 1927, des paroisses orthodoxes russes ont ouvert au Maroc. En 1998, j’ai moi-même consacré la première église russe d’Afrique du Sud.

En tant que président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, puis en tant que patriarche, j’ai visité 18 pays du continent africain entre 1971 et 2016 : au Nord, au Sud, à l’Est, à l’Ouest, et dans le centre. 

Je considère comme particulièrement marquante ma rencontre avec monsieur Nelson Mandela, chez lui à Soweto, début novembre 1990. Cette même année, le 11 février, il avait été libéré de prison, et je crois avoir été le premier étranger qu’il ait reçu. Monsieur Mandela m’a demandé de transmettre aux autorités de l’Union soviétique sa gratitude pour son aide décisive dans le soutien et la livraison du nécessaire pour la lutte contre le régime d’apartheid. Comme on sait, il est devenu président de l’Afrique du Sud en 1994. A présent, permettez-moi de revenir à l’actualité.

A mon grand regret, en 2019, le patriarche Théodore, primat de l’Église grecque d’Alexandrie, a décidé sous la force de pressions extérieures de reconnaître une organisation schismatique en Ukraine, contrevenant par-là gravement aux canons ecclésiastiques. Ces tristes circonstances, je le répète, ont incité l’Église orthodoxe russe à fonder en décembre 2021 l’Exarchat patriarcal d’Afrique.

Nous pensions que le patriarche d’Alexandrie, le patriarche grec, aurait pu représenter l’ensemble de l’Église orthodoxe sur le continent africain, mais il s’est rallié à certaines forces occidentales pour créer ce nouveau schisme au sein de l’orthodoxie. Bien sûr, nous devions réagir à cet acte. Nous avons pris la décision d’organiser la vie des églises orthodoxes sur le continent africain, ce qui n’est pas la moindre des choses, mais l’une des toutes premières.

Parmi les Africains, il n’y a pas seulement des Russes qui vivent dans ces endroits, mais aussi des locaux qui professent l’orthodoxie et appartiennent aujourd’hui à notre Église.

En un an et demi, l’Exarchat patriarcal d’Afrique a ouvert plus de 200 paroisses dans 25 pays africains. En dehors du développement de la vie liturgique, il a été possible de commencer à mettre en place un certain nombre de projets humanitaires et d’enseignement, notamment la traduction de livres dans les langues locales. 

La fondation et le travail de l’Exarchat ont suscité un vif intérêt pour l’Église orthodoxe russe chez les Africains.Beaucoup apprécient que notre Église se fasse la gardienne vigilante de la tradition apostolique aussi bien en matière de doctrine et de sacrements que sur le plan de l’expérience spirituelle ; que nous soyons une Église qui n’altère pas les normes de la morale que Dieu nous a donnée pour satisfaire aux tendances de la mode idéologique.

En développant notre activité pastorale, nous aspirons à apporter notre contribution au renforcement des relations entre la Russie et l’Afrique, à l’amélioration de la qualité de vie des populations. Là où sont fondées nos paroisses, sont aussi fondées des écoles, forés des puits, construits des stations électriques, des hôpitaux et des centres culturels.

Nous avons l’intention d’interagir également de façon constructive avec les autres organisations religieuses d’Afrique. Nos paroisses sont enregistrées en pleine conformité avec la législation des pays où elles sont fondées. Je tiens à remercier particulièrement les chefs d’État de ces pays. Le Patriarcat de Moscou est ouvert à toute initiative pouvant servir le bien des populations, l’établissement de la paix et l’aide aux personnes en détresse.

M’adressant affectueusement aux habitants du continent africain, j’invoque sur vous la bénédiction divine. Que le Seigneur envoie aux peuples de vos pays la paix et la prospérité, et qu’Il accorde aux dirigeants la sagesse, la patience et la force !

J’espère que le présent Forum servira au développement ultérieur de la coopération entre nos peuples dans tous les domaines.

Je vous remercie de votre attention et vous souhaite un travail fructueux.

 

 

Irina Abramova : Merci beaucoup, Votre Sainteté, pour votre déclaration, dans laquelle vous avez analysé en profondeur le volet humanitaire de notre coopération et souligné l’importance du dialogue interreligieux pour relever les défis du développement humanitaire.

 

Notre prochain orateur nous vient ici à Saint-Pétersbourg de l’hémisphère occidental, d’un pays qui est historiquement et culturellement étroitement lié au continent africain. J’invite à la tribune Dilma Rousseff, présidente du Brésil de 2011 à 2016. Le 24 mars 2023, Dilma Rousseff a été élue à l’unanimité à la tête de la nouvelle banque de développement des BRICS.

 

Dilma Rousseff : Votre Excellence Monsieur le Président de la Fédération de Russie Vladimir Poutine, Excellence Monsieur le Président de l’Union des Comores et Président de l’Union africaine, Messieurs les chefs d’État et de gouvernement, Mesdames et Messieurs,

 

Je voudrais commencer par vous remercier pour cette initiative entre la Fédération de Russie et les pays africains. Il s’agit sans aucun doute d’une nouvelle plateforme qui nous permettra de construire un monde plus multilatéral et multipolaire.

Nous savons que le monde d’aujourd’hui est confronté à de nombreuses crises, et dans cette situation, l’instabilité est devenue la norme. Nous avons traversé la crise du coronavirus qui a beaucoup affecté les pays en développement. Nous avons une crise de la dette, nous avons le protectionnisme que nous observons dans de nombreux pays occidentaux. Nous sommes confrontés à des crises politiques et climatiques.

Dans ce contexte, les pays et les économies en développement sont devenus des acteurs de plus en plus importants sur la scène internationale. À eux seuls, les pays du BRICS, par exemple, représentent plus de 40 % de la population mondiale et plus d’un quart du PIB mondial. On ne faudrait pas sous-estimer l’importance de ces économies, incomparable à celle des pays qui composent le G7.

Nous savons que les politiques protectionnistes, qui sont toujours à sens unique, affectent beaucoup plus gravement les pays en développement. L’utilisation de sanctions à des fins politiques et les tentatives d’étendre la juridiction d’un pays en dehors de son territoire ne résolvent aucun problème mais, au contraire, ne font qu’aggraver les problèmes existants, comme nous le constatons de plus en plus. Nous pouvons le constater dans toutes les conséquences, y compris la sécurité alimentaire, et nous le constatons également dans ce forum, qui discute de problèmes non seulement économiques mais aussi humanitaires.

La banque des BRICS – la nouvelle banque de développement des BRICS – qui comprend désormais l’Égypte, le Bangladesh et les Émirats arabes unis, tout comme les banques de développement régionales, soutient les initiatives de développement des pays en développement sur tous les continents. Ils peuvent compter sur des accords pour l’utilisation des monnaies nationales dans les transactions commerciales. Il s’agit d’un outil stratégique dans la recherche d’un équilibre des pouvoirs et la construction d’un monde plus juste et d’un nouvel ordre mondial multipolaire et multilatéral.

La nouvelle banque des BRICS a été créée il n’y a que huit ans, en 2014, lors du sommet des BRICS à Fortaleza. J’ai eu l’honneur d’assister à la création de cette banque avec le président Poutine. Comme elle a été créée par la volonté des cinq pays des BRICS, la banque est souvent appelée la Banque des BRICS, mais elle est devenue quelque chose de plus que cela et ne se limite pas à ces pays.

La NBD a pour objectif d’accumuler des ressources pour aider à la réalisation de projets logistiques et d’infrastructure dans différents pays, développer l’énergie, l’infrastructure sociale entre eux – écoles, universités, établissements médicaux – ainsi que l’infrastructure numérique. Nous savons que la quatrième révolution – la révolution technologique et industrielle – exigera des économies en développement qu’elles changent : elles doivent participer à une nouvelle forme, à un nouveau mode de production. C’est pourquoi nous n’acceptons pas d’être une simple plateforme de consommation des produits des grandes entreprises de haute technologie.

Nous accordons une grande importance au développement des infrastructures dans les pays en développement et à la participation aux économies de ces pays. Pour nous, pour la Nouvelle banque de developpement, c’est l’un de nos principaux objectifs. Nous partageons l’idée que notre travail doit être orienté vers le développement durable et la prospérité de nos peuples, et l’élimination de la menace de la pauvreté et de la faim. Nous devons nous éloigner des problèmes de la faim dans nos pays.

Nous travaillons dans l’esprit d’un véritable multilatéralisme. La Banque s’efforce de transférer les expériences existantes et les meilleures pratiques en matière de développement durable qui ont été élaborées par nos gouvernements.

Il est important de noter ici que la NBD, en accordant ses prêts, ne dépend pas de facteurs externes. Nous savons que les pays en développement dépendent d’autres facteurs et en souffrent depuis des décennies. Nous voulons étendre l’impact de la nouvelle banque de développement des BRICS sur les pays. Nous voulons élargir nos actions, renforcer la banque en tant que plateforme sur laquelle les pays du Sud peuvent se développer. À cet égard, les pays en développement de tous les continents, en particulier l’Afrique, l’Amérique latine et l’Asie, sont nos partenaires stratégiques. Nous augmentons actuellement le nombre de nos actionnaires et de nos partenariats, mais nous augmentons également l’importance des projets que nous finançons. Nous voulons accroître notre influence dans les régions.

Nous aimerions travailler plus étroitement avec tous les pays qui font partie de la Banque. Nous aimerions rechercher des partenariats avec les pays et ne pas nous contenter de travailler sur des projets. Nous aimerions également travailler avec le secteur privé dans les projets les plus importants.

Nous aimerions également recevoir nos recettes sur différents marchés et dans différentes devises, c’est important. La nouvelle banque de développement recevra de l’argent sur différents marchés et dans différentes devises de tous les pays qui font partie du monde en développement, et pas seulement en dollars et en euros. Nous aimerions augmenter le nombre d’opérations dans les monnaies nationales afin de renforcer les marchés des pays qui font partie de la nouvelle banque de développement. Nous pensons qu’il est important d’augmenter la part des investissements privés. Nous pensons que nos membres ne doivent pas souffrir des problèmes qui peuvent survenir sur les marchés occidentaux, c’est pourquoi nous développons nos règlements.

Nous aimerions créer différentes sources de recettes afin que les pays en développement puissent parvenir à la stabilité. À l’heure actuelle, nous savons qu’environ 20 % de toutes les transactions bancaires se font en monnaies locales. En Chine, environ un tiers des transactions bancaires sont effectuées en monnaie locale.

Notre programme 2022-2026 prévoit une participation d’environ 30 % des monnaies nationales. Je tiens à souligner que l’utilisation des monnaies nationales est l’une de nos priorités dans la construction de la nouvelle architecture des relations financières dans le monde. Il ne s’agit pas de remplacer les monnaies utilisées, mais de développer les monnaies de règlement et l’infrastructure financière existante.

Les pays des continents latino-américain, africain et asiatique subissent souvent les effets négatifs d’économies qu’ils ne peuvent pas contrôler, comme les hausses de taux d’intérêt. Nous ne voulons plus subir ces changements, des chiffres que nous ne pouvons pas contrôler et dont nous ne faisons que subir les conséquences.

Le troisième point important pour la nouvelle banque de développement est le développement socio-économique et l’augmentation de l’inclusion sociale. Nous ne pensons pas qu’il soit nécessaire d’imposer notre vision à chaque pays, nous percevons des projets de développement différents et la voie souveraine de chaque État. La nouvelle banque de développement souhaite soutenir des projets qui contribuent à aplanir les différences sociales et à améliorer le niveau socio-économique de chaque pays.

Nous pensons également qu’il est important de créer des projets d’infrastructure qui contribueront à la réalisation de cet objectif. La Banque a déjà approuvé 98 projets dans les pays membres, pour un montant total d’environ 35 milliards de dollars.

Nous coopérons avec différentes banques régionales. Nous coopérons avec la Banque africaine d’import-export et d’autres banques qui travaillent dans le domaine du développement économique et social. Nous travaillons également avec des investisseurs privés et nous pensons que notre travail commun nous aidera à réaliser des projets d’infrastructure et de logistique afin d’améliorer le niveau de vie dans les pays membres.

Je suis convaincue que la nouvelle banque de développement des BRICS et tous les pays membres deviendront à l’avenir des acteurs de plus en plus importants sur la scène internationale et que la banque deviendra une nouvelle plateforme. Dans ce contexte, ce sommet répond aux défis de notre temps et s’inscrit dans le droit fil des questions auxquelles notre banque est confrontée, en contribuant à la réalisation d’un monde multilatéral au profit des pays en développement.

Notre monde est aujourd’hui en constante évolution et fait face à différentes menaces. Ensemble, nous pouvons mieux répondre aux nouveaux défis. Sans paix, il n’y a pas de stabilité, et sans stabilité, il n’y a pas de développement, en particulier de développement durable. Sans développement durable, le monde ne parviendra pas à des accords qui nous permettraient d’améliorer nos vies et de parvenir à des accords qui enrichissent les gens et notre planète.

Merci beaucoup

 

 

Irina Abramova : Merci beaucoup, chère Madame Rousseff, pour votre déclaration, qui montre clairement que la Russie et l’Afrique ont toutes deux de nombreux partisans sur différents continents.

 

Le prochain participant à la session plénière est présent sur cette scène pour la deuxième fois. Il a participé à la session plénière du Forum économique [Russie-Afrique] à Sotchi [en 2019], et ce n’est pas une coïncidence. La question du soutien financier à la coopération Russie-Afrique est l’une des questions clés aujourd’hui.

 

J’invite Monsieur Benedict Okey Oramah, président de la Banque africaine d’import-export, à monter sur le podium.

 

Benedict Oramah : Votre Excellence Vladimir Poutine, Président de la Fédération de Russie !

Votre Excellence Monsieur Azali Assoumani, Président de l’Union des Comores et Président de l’Union africaine,

Mesdames et Messieurs, Excellences Mesdames et Messieurs les représentants des pays africains,

Votre Excellence Monsieur Mahamat, Président de la Commission de l’Union africaine,

Mesdames, Messieurs,

 

C’est pour moi un honneur et une joie d’avoir l’occasion de m’adresser à vous à l’occasion du Forum économique Russie-Afrique 2023.

Je voudrais remercier Son Excellence Vladimir Poutine, son gouvernement et le peuple russe d’avoir démontré une fois de plus la force et la coopération entre le peuple russe et les peuples des pays africains, même à un moment où le monde est confronté à des défis inédits.

Excellence, Lorsque nous vous sommes rencontrés à Sotchi en 2019 en marge du premier Sommet Russie-Afrique, nous avons exprimé notre engagement à développer les liens commerciaux et d’investissement entre la Russie et l’Afrique. Nous avons convenu de porter les relations socio-économiques entre nos pays à un niveau supérieur en nous appuyant sur le fait que nous avons travaillé ensemble dans les années 1950, lorsque le continent africain s’efforçait d’accéder à l’indépendance.

Le volume de nos échanges commerciaux devrait atteindre 40 milliards de dollars d’ici 2026. 

Il est actuellement de 20 milliards de dollars. Et ce, malgré la pandémie de coronavirus et tous les défis auxquels nous sommes confrontés sur la scène internationale.

Grâce à un partenariat solide entre Afreximbank et le Centre d’exportation de Russie, nous avons l’intention de doubler ce volume au cours des quatre prochaines années, et nous pensons que cet objectif est à notre portée. Les défis de la sécurité alimentaire mondiale ont mis en évidence le rôle clé de la Russie pour assurer la sécurité alimentaire de l’Afrique. Les économies africaines dépendent fortement de l’approvisionnement en engrais russes, et une grande partie des engrais que nous importons provient de Russie.

La priorité d’Afreximbank et des États membres africains est de préserver et de soutenir les flux commerciaux. Nous vivons une période d’instabilité mondiale sans précédent. Afreximbank travaille avec la Commission de l’Union africaine, le système des Nations unies et ses partenaires russes pour nous permettre d’utiliser une plateforme de commerce électronique qui sert à assurer le règlement dans toutes les devises dans notre intérêt mutuel et de manière transparente. Différents services sont fournis qui permettent des services de paiement au sein de cette plateforme. En outre, d’autres banques ont la possibilité de participer au travail commun. Nous utilisons cette plateforme pour répondre aux besoins en engrais et en céréales des pays africains.

Trois milliards de dollars ont été alloués pour soutenir le commerce. Ces trois milliards de dollars sont un prêt qui a été mis à disposition pour revitaliser les entreprises et faire en sorte que nous puissions répondre aux besoins du continent africain. Nous chercherons à développer notre engagement avec nos partenaires russes et nous utiliserons cette plateforme pour faciliter la fourniture de céréales et d’engrais.

Chaque jour, 300 millions d’Africains souffrent de la faim, et il est très important que nous travaillions dur pour assurer notre pleine souveraineté. Il est impératif que nous assurions une sécurité alimentaire totale, c’est l’une de nos priorités.

L’Afreximbank et le Centre d’exportation de Russie travaillent ensemble pour s’assurer qu’il y ait une collaboration dans d’autres domaines clés. L’accent est mis sur les activités qui contribuent à l’intégration des économies africaines et, surtout, à la mise en œuvre de la zone de libre-échange continentale africaine.

Afin de soutenir les investissements dans le secteur agricole, des parcs industriels sont en cours de création, des infrastructures essentielles sont développées et des échanges en matière de santé publique sont mises en place. L’Afreximbank sera en mesure de soutenir les investisseurs africains qui souhaitent profiter des opportunités et s’implanter sur le marché russe. Nous nous félicitons donc des investissements russes en Afrique. Dans le même temps, nous espérons que les investisseurs africains se tourneront vers la Russie car les investissements peuvent aller dans les deux sens et cela contribuera à revitaliser les relations commerciales et économiques entre nos pays.

Votre Excellence, à l’issue de ce deuxième Sommet, j’espère que la Russie et l’Afrique parviendront à renforcer leur solidarité et à sécuriser les voies d’approvisionnement en engrais et en céréales, alors qu’aujourd’hui les chaînes d’approvisionnement ont été perturbées. Nous espérons que nos échanges commerciaux se poursuivront. J’ai été très heureux d’entendre le président Poutine parler des nouvelles routes commerciales qui contribueront à faciliter l’approvisionnement de notre continent.

En outre, j’espère que nous pourrons ensemble tirer parti des possibilités offertes par la zone de libre-échange continentale africaine.

Il y a moins de 20 ans, la Russie était un importateur net de produits alimentaires. Aujourd’hui, elle représente 20 % des exportations mondiales de céréales.

Nous espérons que le nouveau partenariat que nous construisons avec la Russie, en particulier grâce à ce sommet, permettra à l’Afrique d’atteindre les mêmes objectifs dans un délai très court.

Je vous remercie pour votre attention.

 

 

Irina Abramova : Cher Monsieur Oramah, je vous remercie, ainsi que tous les participants à la session plénière, pour leurs interventions qui ont déterminé les orientations stratégiques de nos futures discussions.

 

Excellences,

 

Honorables participants et invités,

 

Cette séance plénière est maintenant levée. Je souhaite à tous un travail fructueux et, surtout, productif.

 

(Applaudissements)

 

Source : kremlin.ru



« Nous apprécions au plus haut point le travail que nous avons fait ensemble au Sommet. Je suis convaincu que les résultats obtenus constituent une bonne base pour continuer à renforcer le partenariat Russie-Afrique dans l’intérêt de la prospérité et du bien-être de nos peuples. »

Vladimir Poutine,
Président de la Fédération de Russie

Le Sommet Russie-Afrique qui aura lieu à Sotchi du 23 au 24 octobre 2019 incarne les liens d'amitié séculaires entre le continent africain et la Fédération de Russie. Ce Sommet, unique en son genre, revêt une importance particulière pendant cette période de transformations à l'échelle mondiale et internationale. En réponse aux aspirations de nos peuples, son objectif primordial est l'élaboration d'un cadre intégré pour faire avancer les relations russo-africaines vers une coopération plus large dans divers domaines.

Les pays d'Afrique et la Russie partagent une vision similaire de l'action internationale, une action fondée sur le respect du droit international, de l'égalité, de la non-ingérence dans les affaires intérieures des États, du règlement pacifique des différends et de l'engagement aux mesures multilatérales face aux nouveaux défis internationaux. Nos pays visent à assurer la sécurité, la paix et le développement du continent africain et de la Russie, ainsi nous condamnons le terrorisme et l'extrémisme sous toutes leurs formes. Nous réaffirmons notre conviction qu'il est important de promouvoir des échanges commerciaux et des investissements mutuels afin d'éviter tout ralentissement de la croissance économique.

Les pays d'Afrique possèdent un potentiel important et des capacités qui leur permettront, à terme, de joindre les rangs des puissances économiques en développement. Ces dernières années, les pays africains ont fait de grands progrès face aux défis politiques, économiques, sociaux et gestionnaires. Au cours de la dernière décennie, la croissance économique de l'Afrique s'est accélérée, le taux de 3,55 % a été atteint en 2018.

En juillet 2019, en poursuivant les efforts des pays africains, la ratification de l'accord sur la Zone de libre-échange continentale africaine et le lancement de sa phase opérationnelle ont été effectués à l'occasion d'un sommet extraordinaire de la Commission de l’Union africaine au Niger. Cet accord est un des objectifs principaux de l'Agenda 2063 qui vise à répondre aux attentes de prospérité et de dignité du peuple africain.

Ces succès ouvrent la voie à la collaboration entre les pays d'Afrique et la Fédération de Russie et montrent un véritable engagement politique des gouvernements et des peuples africains prêts à établir des partenariats mutuellement bénéfiques.

Nous espérons que le Sommet Russie-Afrique contribuera à la promotion de relations stratégiques constructives basées sur la coopération multilatérale. Nous souhaitons que ce partenariat réponde aux espoirs et aux aspirations des peuples africains et du peuple russe ami.

Président de la République arabe d'Égypte
Abdel Fattah AL-SISSI